Les très riches heures du duc de Berry ont vu le jour lors d’une époque violente et troublée de l’histoire de France. Mais elles sont, avant tout, la conséquence d’une rencontre entre un mécène fastueux et trois artistes exceptionnellement doués.
Fils du roi de France Jean II le Bon, Jean de Berry naît en 1340. Il reçoit une éducation raffinée au contact d’hommes de lettres.
Immensément riche, Jean de Berry est connu de ses contemporains pour son train de vie fastueux. Ses résidences sont nombreuses : Il fait rénover le palais royal de Bourges, celui de Poitiers ; Il en fait bâtir un autre à Riom. Enfin, il restaure en profondeur le château de Bicêtre (actuelle commune du Kremlin-Bicêtre),. Le château de Mehun-sur-Yèvre est aussi réputé, seules quelques ruines subsistent, mais Les Très Riches Heures permettent de s’en représenter l’aspect extérieur au début du XVe siècle.
Grâce aux inventaires dressés par le « garde des joyaux », nous pouvons prendre la mesure de la collection d’art du Duc de Berry. Très peu de ces œuvres sont parvenues jusqu’à nous, Au XVe siècle, quand de besoin, les métaux précieux sont fondus pour battre monnaie et ce, parfois, par le duc de Berry lui -même ! C’est dans ce contexte que Jean, Duc de Berry, passe commande d’un livre d’heures encore plus riche que les précédents auprès de trois frères : Paul, Herman et Jean de Limbourg, qui portent le titre de « peintres du duc ».
Qu’est-ce qu’un livre d’heures ?
Le livre d’Heures est principalement destiné aux laïcs, c’est à dire à tous ceux qui ne sont ni prêtres ni moines. Il s’agit du livre le plus diffusé au Moyen-Âge.
Les livres d’heures sont apparus, au XIIIe siècle. Jusqu’aux années 1420, on les trouve majoritairement en France, puis dans les Flandres et en Europe méridionale. Le terme « heures » vient des « heures canoniales », en plus de la messe quotidienne, on prie plusieurs fois par jour, à heures fixes. Les chrétiens peuvent ainsi prier jusqu’à huit fois par jour, à l’aide de livre d’heures.
Les dames de la bonne société, qui les reçoivent fréquemment en cadeau de mariage, les utilisent pour enseigner la lecture à leurs filles.
Tous les livres d’heures ne sont pas richement enluminés. Des nobles de moindre rang, ou des citadins, pour peu qu’ils sachent lire, peuvent en acquérir, mais leur facture est plus banale.
Les très Riches Heures, sont en revanche un manuscrit de prestige, de nombreuses prières s’ajoutent en schéma classique, pour former un ensemble exceptionnel.
Vers 1411, les Limbourg entament la réalisation des Très Riches Heures. La réalisation s’interrompt en 1416, lorsque le duc de Berry et les trois frères sont victimes d’épidémies. A cette date, l’ouvrage n’est pas totalement terminé : Une partie du cycle de prières n’a pas été copiée et plusieurs enluminures manquent ou sont à l’état d’esquisse. Elles sont achevées par d’autres peintres. Mais il convient de préciser que, déjà de leur vivant, les Limbourg se font aider par un copiste, chargée du texte, mais aussi par au moins six autres enlumineurs, en charge des initiales décorées de motifs végétaux ou des bouts de ligne*.
Quant à l’iconographie. Dans le calendrier, chaque mois fait face à une représentation des travaux qui lui correspondent ; une scène de travaux agricoles, des réjouissances aristocratiques. ..
Les extraits des évangiles sont accompagnés d’un portrait de chacun des auteurs et l’office de la Vierge illustré de scènes de la vie de Marie et de l’enfance du Christ.
Le mois de janvier est le seul où le duc figure en personne. Le duc est évoqué via les châteaux représentés tout au long du calendrier, appartenant au duc de Berry. La différence d’exécution entre les cycles des mois montre que les enlumineurs travaillaient chacun de manière indépendante sur certain nombre de bifeuillets ** à enluminer.
L’ouvrage a été relié vers 1524.
* Bout de ligne : Rectangle décoré de manière ornementale qui vient remplir l’espace laissé vierge à la fin d’une ligne
**Bifeuillet : pièce de parchemin rectangulaire pliée en deux et qui forme ainsi deux feuillets, soit quatre pages. Les bifeuillets sont insérés les uns dans les autres et cousus ensemble pour former des cahiers. L’assemblage des différents cahiers donne un livre.
Source : Les Très Riches Heures du duc de Berry.
Laurent Ferri, conservateur de la bibliothèque et des archives.
Hélène Jacquemard, bibliothécaire assistante spécialisée.
Dame Tiffen, le 12/01/2019.
Un excellent travail de Dame Tiffen. Ça donne vraiment envie de découvrir cet ouvrage.
Bravo !