La sorcière du Moyen Âge n’est pas celle que vous croyez …

La femme aux pratiques spirituelles alternatives, équipée de ses chaudrons, balais, herbes et cristaux… Laissez de côté cette image moderne. Pour saisir la complexité de la perception médiévale de la sorcellerie, et la croyance passée en la puissance des sorciers et des sorcières, il faut pouvoir se replonger dans l’état d’esprit d’une époque très éloignée et radicalement différente.
Le Moyen Âge, est une période très longue couvrant pas moins de 1000 ans d’Histoire. En conséquence, les avis n’ont pas toujours été équivoques sur la conception de la puissance des démons et sur leur capacité à influencer les êtres humains et le réel.
Au début de l’ère du christianisme médiéval, l’une des théories largement relayées est celle de l’évêque Augustin d’Hippone (354-430 apr. J.-C.), qui cantonne les démons au monde onirique. Selon cette perspective, ces « substances aériennes » sont impuissantes à affecter concrètement le présent ou la réalité matérielle du monde. Il estime en revanche qu’elles ont la capacité d’évoquer des images dans l’esprit des êtres humains, notamment par le biais des rêves.
Avec le temps, cette conception des interactions entre les humains et les diables évolue. Au XIe siècle, l’évêque Burchard de Worm rédige un ouvrage dans lequel il associe des pénitences tarifées aux péchés commis par les fidèles de son diocèse. Or, dans ce pénitentiel, il mentionne le « vol magique », c’est-à-dire la croyance selon laquelle certains individus se rendraient secrètement à des réunions nocturnes pour adorer la déesse Diane ou Hérodiade : naît l’imaginaire du sabbat.
Existait-il vraiment des sorciers et sorcières au Moyen Âge ?
Contrairement à notre époque, où certaines personnes revendiquent ouvertement (et fièrement) leur pratique de la sorcellerie — bien différente de la conception médiévale, vous l’aurez compris — personne ne se vantait entre les XIVe et XVe siècle de détenir de tels savoirs, et ne se positionnait ainsi comme figure de « rébellion » ou de « lutte contre l’oppression seigneuriale ou ecclésiastique ».
Quant à la question de savoir si, derrière tous les individus accusés de sorcellerie au Moyen Âge, se cachaient réellement des personnes qui auraient pactisé avec le diable dans le but d’acquérir un certain nombre de capacités magiques, rien n’est moins sûr, explique Maxime Gelly-Perbellini .
En fin de compte, quelle est finalement la part de réalité ou de fiction dans les accusations de sorcellerie ? C’est une très bonne question en soi, qui anime profondément les débats historiographiques.
Les sorcières ne sont pas l’affaire du Moyen Âge mais de l’époque moderne. » Voici ce qu’en écrivait Michel Pastoureau, grand historien français des couleurs, des emblèmes et des animaux.
Mona Chollet, invitée pour son ouvrage Sorcières : la puissance invaincue des femmes aux éditions La Découverte énonçait également que ce n’est véritablement que sous la Renaissance que la chasse aux sorcières eu réellement lieu.
Bravo pour cet intéressant article Dame Tiffen
Oui, moi aussi j’ai trouvé intéressant . Merci pour ton petit mot?
Super Dame Tiffen. Bel article
Imaginaire, rêve ou transcendance et spiritualité
Les sorcières furent considérées comme diaboliques, laides, malfaisantes par le clergé qui voyaient en elles une nouvelle forme de croyance du petit peuple dans une « méthode » capable d’emprise sur le monde physique . En ne comptant plus seulement sur une félicité post mortem et l’intervention divine dans les affaires terrestres, le peuple s’offrait une part d’imaginaire coupable . Ainsi les sorcières bouleversaient un ordre séculaire établi et ses privilèges ecclésiastiques. Ces rivalités n’avaient que peu de raison d’être car
les sorcières et sorciers ne visaient ni la spiritualité ni la transcendance mais espéraient apporter un peu de réconfort au quotidien (ce qui manque fort de nos jours). Qui pour jeter un sort sur les va t’en guerre ? qui pour mijoter un indispensable philtre d’amour ?
Merci pour ce point de vue très documenté et référencé. Ce qui est sûr, c’est que les sorcières nourrissent notre imaginaire individuel et collectif.
Alors aujourd’hui, être traitée de sorcière, est-ce une insulte ou un compliment ?
Après lecture, je pencherai plutôt pour la 2ème option …;-)